Jean-Marc VIVIER

       J’ai reçu le souffle de la vie à Barbâtre, dans l’île de Noirmoutier, terre étrange située entre deux rivages contrastés, isolée au sein des flots, égarée au bout du monde… Enfant de la mer océane et du ciel sans frontières, enfant du pays de l’infini, je me suis éveillé à la vie dans ces espaces incontrôlés, rythmés par le mouvement incessant des marées et tourmentés par la brise salée de suroît…

      Dans cette ancienne école, devenue salle des Noures, j’ai appris à écrire le nom des choses, à les compter, à les dessiner… Mes yeux d’enfant ont découvert les objets du quotidien, pelles, pioches, filets, fouënes, nasses, outils de la terre et de la mer, pommes de terre, figues, sel, crabes et araignées, produits de la terre et de la mer et aussi du travail des hommes ;  j’ai écouté les cris du vent et des goëlands, déchirés et menaçants, les incantations en patois des habitants, affairés à leurs travaux de la terre et de la mer et je garde en mémoire les traces indélébiles de cet univers ancien, qui poursuit son évolution irréversible…

      Avec une nostalgie ardente, je revois et revis ces moments du passé, de mon passé… Le temps s’écoule et estompe chaque jour davantage les vestiges des générations disparues ainsi que leurs souvenirs… Une sensation oppressante s’empare de moi. Je souhaiterais arrêter le temps et fixer à jamais ces traces de mon passé… Quelle prétention !

      C’est pourtant ce que j’ai tenté de faire avec cette série de dessins réalisés à partir de cartes postales anciennes. Dans mon souvenir, les couleurs se sont dissipées et il ne reste que des silhouettes ternies, que ma mémoire a emmagasinées… Pour me les approprier, je les ai stylisées et marquées de mon empreinte. Je les contemple aujourd’hui et m’accroche à la chaleur qu’elles conservent encore… Nostalgie…

      Petite patrie, toi qui prends racine dans les tréfonds de l’Océan et dans la nuit des temps, toi qui t’évades dans le ciel sans limites et qui reçois les vents du large, je veux te remercier de m’avoir donné la vie, de m’avoir accueilli sur ton terroir et parmi les tiens. Je veux te remercier, aussi, de m’avoir nourri généreusement, de m’avoir offert ces présents qu’aujourd’hui je tiens à partager avec toi… Avec vous aussi…  

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