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Le passage du Gois

Le pays du GOIS nous offre, à travers la variété de ses facettes, un cadre de vie à la fois rude et accueillant: tous les éléments sont placés en mouvement perpétuel: brise légère ou vent violent, rythme implacable des marées... Une instabilité constante, une véritable osmose entre terre et mer qui façonne paysages et habitants. 

Terroir de contrastes étonnants que cette ile de Noirmoutier, au double visage: d’une part, sa plaine, ses polders, ses digues et son littoral vaseux, gris et paisible, et, d’autre part sa plage immense, sableuse, agitée et battue par les vents, bordée de dunes et de pins... En l’espace de quelques centaines de mètres, comme par enchantement, nous avons changé d’univers....

« Je te montrerai le chemin que tu dois suivre, je serai ton conseiller, mon œil sera sur toi. » (Psaume 32,8)

      Dans le pays où je vis, il existe un gué de 4 km 500, unique au monde. Il se découvre à marée basse et relie ainsi l’île au reste du continent : la France. Jusqu’en 1971, époque à laquelle fut construit un pont, sur le goulet, il n’existait aucun chemin d’accès autre 
que ce gué – LE GOIS -  pour sortir de l’île. Dans l’armoire de la cuisine, l’horaire des marées est affiché en permanence, qui précise, à la minute près, l’ouverture ou la fermeture du passage sous-marin.


 


      C’est un spectacle dont on ne se lasse pas : voir à l’heure dite, l’eau monter peu à peu sur la chaussée, effacer jusqu’à son tracé qui sera finalement recouvert de trois mètres d’eau durant la pleine mer, et, à l’inverse, guetter la lente découverte, puis la réapparition de la route humide surgie des flots, artère vitale qui rétablit pour quatre heures la circulation entre les îliens et le vaste monde. D’avoir tant et tant de fois observé ce phénomène aussi précis qu’un chronomètre m’a amenée à le comparer à la direction  de Dieu dans nos vies : souvent cachée, subitement dévoilée, pour disparaître à nouveau et nous plonger dans l’incertitude, nous abandonner à la marche hésitante par la foi, où nous avançons en tâtonnant.


      A la charnière de nos choix, au carrefour de nos décisions, combien nous aimerions parfois disposer de quelque urim ou de quelque thumim (1), de quelque dé ou toison (2) qui décideraient à notre place. Et vite, si possible ! Au lieu de cela, nous voilà, chrétiens adultes, livrés au dessein de l’Esprit Saint, qui, dans le silence, sonde notre confiance, exerce notre patience et taille à grands coups un instrument apte à entrer avec souplesse dans la volonté de Dieu.  Dans la nuit  indispensable à toute maturation, un plan encore caché attend dans le secret le dévoilement final.


      Cependant, jour après jour, fidèlement, la route continue sous la mer, même si nos yeux ne la distinguent plus et si notre vue insuffisante bute sur tant d’opacité. « Non pas ce que je veux, Seigneur, mais ce que tu veux. »

Denyse SERGY, Des coquillages pleins les poches
Editions Ouverture, Le Mont-sur-Lausanne, SUISSE, 1990

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Artiste peintre

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